Tous trois, dans des registres très différents, sont très tentants à traduire et ont la longueur et la structure requises pour être scindés en trois publications successives. Chacun, à sa manière, réprésente un jalon des littératures de l’imaginaire au début du vingtième siècle.
The inheritors est sans doute le plus étrange, autant parce qu’il témoigne de la rencontre de deux géants littéraires que par le thème qu’il explore. Les « héritiers » dont il est question ici prétendent arriver de la « quatrième dimension » et vouloir conquérir le monde. Marginalement science-fictif, ce roman témoigne avant tout du remplacement d’une société qui s’efface (celle de l’aristocratie britannique, avec ses codes) par une autre (celle dominée par la finance et le pouvoir politique, cynique et décomplexée). Et s’il n’a pas grand-chose de la « scientific romance » qu’il était originellement destiné à devenir, il provoque aujourd’hui encore des échos certains en relation avec notre présent en marche arrière.
Beaucoup plus légère et distrayante est la lecture de A honeymoon in space, l’un des derniers romans de Griffith, fix-up d’une série de nouvelles précédemment parues en magazine. Pour lui épargner un mariage forcé, Lenox, comte de Redgrave, enlève sa belle et l’embarque dans une lune de miel qui leur fera visiter toutes les planètes du système solaire, chacune ayant sa spécificité et sa race humanoïde native. Délicieusement kitsch et foutraque en diable, ce n’est pas le premier roman de ce type (Across the zodiac, de Percy Greg, en 1880 et A journey in other worlds, de John Jacob Astor IV, en 1894, l’ont précédé), mais c’est assurément le plus inventif et divertissant.
Quant à The air trust, il s’agit d’une véhémente dystopie politique dans la lignée du Iron hell de Jack London, paru huit ans plus tôt. Ici, le péril n’est pas jaune ‒ il a la couleur verte du dollar ‒ mais il n’en est pas moins implacable et destiné à dominer le monde. Lassé de ne faire qu’amasser des fortunes, un magnat morphinomane conçoit le projet diabolique de manufacturer l’air ambiant en faisant payer aux humains l’oxygène qu’ils respirent. On se doute que grâce à la vaillante résistance de la classe ouvrière (England ne mettait pas son drapeau dans sa poche et plaidait ouvertement pour une révolution prolétarienne, violente si nécessaire), l’infâme rencontrera quelques problèmes. Un document qui n’oublie pas d’être un roman.
Alléchant, non ? Chacun d’eux, à sa manière. Comment décider ? Et si vous me donniez votre avis ? Quel roman avez-vous envie de lire, l’année prochaine, dans les colonnes du Novelliste ? A vous la parole (en commentaire).
Aucun. C’est la seule chose que je n’aime pas dans la revue. Je ne veux pas devoir attendre un an minimum pour un roman complet. Une autre novella à la place, ou plusieurs nouvelles (une série supplémentaire ?) & articles, steuplé. 😉
Ce n’est pas si simple cher Pierre-Paul. S’il ne s’agissait que de te faire plaisir, ce serait certes envisageable, mais nous parlons là de romans qui n’ont aucune chance d’être traduits ailleurs, tant leur potentiel commercial est… microscopique, même pour un micro-éditeur. C’est tout le principe de ces romans à suivre : même s’il faut attendre un an pour avoir la totalité (certains s’y résignent, d’ailleurs, avant de les lire, rien ne t’empêche de faire pareil, il reste quand même grosso-modo 450 000 signes de lecture supplémentaire dans chaque numéro), au moins au bout du compte la traduction existe, ce qui n’aurait pas été le cas autrement. C’était tout l’intérêt, pour moi. A présent, si une majorité se dessine… 😉
The Air Trust me tente bien (mais la légèreté annoncée de Honeymoon in Space pourrait être amusante)
à bientôt
JF
Un vote « normand », donc ? 😉 Je prends note, merci.
Aucune hésitation possible : A honeymoon in space, de George Griffith, bien évidemment !!! ^_^
Je te reconnais bien là, grand romantique que tu es ! 😉
Pas pressée puisque j’ai de quoi lire en attendant, j’attends pour les entamer qu’ils soient achevés… dans la théorie, car j’ai craqué et lu la première partie d’Hartmann dans le train. Ahem.
J’aime bien l’aisance et l’humour discret de Griffith que tu nous as déjà fait découvrir par deux fois, Conrad est un standard, et pour le coup, George Allan England me tente parce qu’il m’est inconnu et par l’histoire. Mon vieux et mauvais fond laborieux qui prend le dessus. ^^
Encore une réponse de Normande… :-/
J’ai bien peur que cette consultation démocratique ne me mène pas bien loin et que je doive finalement reprendre mes réflexes d’autocrate. 😀
Tssss… tu t’es décidé entre-temps, c’est tout ! 😀 J’ai nettement donné ma préférence, sauf que c’est impossible de déclarer que je n’ai pas envie de lire les deux autres. Non mais t’imagines le dilemme ! 😀
Je vote Griffith.
Net et sans bavure.
(je suis très surpris que le Conrad/Ford n’ai jamais été traduit ceci dit)
Enfin un vote tranché ! 😀 Merci.
Pour le Conrad/Ford, c’est un roman déroutant, qui n’a pas toujours bonne réputation. Ceci explique sans doute cela. En ce qui me concerne, sans aller jusqu’à le trouver excellent, je trouve que sa qualité (bien au-dessus de la moyenne) et son originalité mériteraient qu’on le traduise. Il y a notamment certains passages où l’on reconnaît en gestation le Conrad du Coeur des ténèbres. Et puis un roman qui compte pour personnage Winston Churchill himself, ce n’est quand même pas courant ! Il y a aussi de longs développements sur le monde littéraire britannique de l’époque (vu de l’intérieur, le personnage principal est écrivain) qui ne peuvent qu’intéresser les fondus dans notre genre. Seul bémol agaçant, un antisémitisme « d’époque » assez marqué qui se manifeste sur un ou deux chapitres. Mais comme vous le savez, ils n’étaient pas si nombreux, en ce temps-là, à être exempts de cette aberration mentale.
Cet article du Guardian sur le sujet est assez pertinent :
https://www.theguardian.com/books/booksblog/2011/jan/14/joseph-conrad-science-fiction
Et pour tout vous dire, cela fait un moment que la traduction de ce roman me titille, même si ce n’est pas pour le Novellilste et même si Flatland ne doit en vendre qu’une trentaine. Flatland est d’ailleurs fait pour ça… 🙂
hmm… en ce qui me concerne, The inheritors me met l’eau à la bouche bien plus que les deux autres…
Hmmm… voilà qui n’est guère pour m’étonner, de fait… Mais le Griffith a toujours une voix d’avance sur les deux autres. Encore un effort (non je n’avouerai pas que j’ai une légère préférence…) ^^
J’hésite entre « A honeymoon in space » et « The air trust » (qui me rappelle un peu Brunner, un bon point pour lui), mais le premier me semble plus adapté au format épisodique, je donne donc mon vote au Griffith !
Un vote argumenté, merci !
Pour l’instant, le Griffith l’emporte haut la main…
«The inheritors» pour moi. Parce que les George, ça va cinq minutes!
De rien…
😀
Merci m’dame… Un choix motivé par un argument de poids !
commentaire d’un authentique normand, je suis comme PPD, je n’aime pas les romans a suivre dans les revues , ais s’il faut faire un choix alors je penche pour le Georges Allan England , on thème me séduit .
Merci pour le vote, qui fait (pour l’instant) basculer le scrutin en faveur du England, puisque les trois titres étaient à égalité.
Depuis le commentaire de Pierre-Paul, l’idée a fait son chemin, et votre avis vient peser encore plus en ce sens.
Un scoop : les futurs romans à suivre du Novelliste ne seront plus à suivre.
A suivre…
🙂
Sans hésitation le Griffith d’abord qui doit pouvoir se lire en 3 fois sans problème et qui a l’air très fun… Cela dit le England me tente aussi, mais dans ce cas j’attendrai la sortie des 3 numéros pour le lire. Non, ce n’est pas une réponse de Normand (je suis Catalan), mais une hiérarchisation temporelle. Nuance ^-^
Merci de cet avis catalan… 🙂 Ceci dit, la donne entretemps a changé, puisque le comité central de la revue a décidé à l’unanimité d’arrêter à partir du numéro 4 les romans « à suivre », afin de donner satisfaction aux demandes insistantes du camarade Durastanti (entre autres). Les romans (courts) seront désormais publiés en une seule fois, mais pas dans chaque numéro : à un rythme d’un chaque année environ.
Dans un premier élan, je vote pour The air trust mais je me dis que c’est peut-être trop sur les traces du feuilleton en cours alors la raison me fait pencher pour A honeymoon in space
Merci ! Voilà qui fait pencher la balance en faveur de Griffith. Mais je m’aperçois qu’il faudrait peut-être fixer un terme à cette grande consultation populaire.^^ Disons que ce sera le 31 décembre minuit.
Je vote pour The inheritors qui me semble être le meilleur d’un point de vue littéraire.
Merci pour ce vote supplémentaire. C’est très, très serré. J’ai recompté les votes ce soir (ici + 2 votes sur Twitter). Inheritors et Air trust sont à égalité, et Honeymoon reste un point devant eux.
1 : « The air trust »
2 : « Honeymoon »
à défaut de pouvoir lire un jour « Angel of revolution » ou tous les autres romans de guerres futures de Griffith
Cher Jean-François
Merci pour ce nouveau (et ultime) vote. Normalement, le vote était clos le 31 décembre minuit, mais étant donné que les trois romans était à cette date à égalité et que je décide arbitrairement d’une exception, je prends en compte ton vote quand même.
Ce qui fait que ‘The air trust’ sera bien le prochain roman à suivre du Novelliste.
Pour ‘The angel of the revolution’ il ne faut pas désespérer. J’ai moi-même mis ma traduction en stand-by parce qu’un autre projet plus avancé m’a été communiqué. Je ne sais pour le moment où ça en est. Des nouvelles dès que j’en sais plus…