CSG : une demi-mesure provisoire ne répare pas une injustice, encore un effort madame la ministre

Le couperet ministériel est donc tombé : une solution a été trouvée pour compenser intégralement la hausse de la CSG pour les artistes-auteurs. Ah ? Très bien… Quelle est-elle ? Ben… après avoir relu trois ou quatre fois le communiqué de presse censé nous l’apprendre, j’en suis encore à me le demander. Ce qui semble sûr, c’est que la solution tant attendue ne sera ni pérenne ni pour tous les artistes-auteurs. À ce niveau de flou dans la communication, on ne peut qu’interpréter la trop vague parole ministérielle. Ce que tente de faire le SELF, dont je reproduis ci-dessous un communiqué sur le sujet diffusé hier.

 

Par un communiqué de presse en date du 29 novembre, Mme Françoise Nyssen, ministre de la Culture, a annoncé avoir trouvé « une solution permettant de garantir aux artistes-auteurs un maintien de leur pouvoir d’achat dans le contexte de hausse de la CSG ». La ministre se félicite en outre « de cette solution et remercie chaleureusement tous les parlementaires qui se sont forte­ment mobilisés aux côtés du ministère et des auteurs sur ce sujet ». S’il est vrai que la mobilisation des artistes-auteurs légitimement révoltés par cette injustice qui leur était faite fut rapide et mas­sive, il est un peu abusif d’affirmer qu’il en fut spontanément de même dans les cercles du pouvoir, tant le flou, l’inertie et le silence qui prévalaient sur ce dossier à l’ouverture des discussions à l’Assemblée laissaient craindre le pire. Si « solution » il y a aujourd’hui, c’est avant tout parce que les artistes-auteurs et leurs organisations professionnelles ont su faire entendre leurs voix et leurs revendications, et rien n’indique que ce résultat aurait été obtenu s’ils ne l’avaient pas fait. Pour autant, peut-on s’en satisfaire ? À y regarder de plus près, rien n’est moins sûr.

Ce qui frappe d’emblée à la lecture du communiqué de presse, c’est le flou (artistique, peut-être, mais guère rassurant) qui entoure cette annonce. « Afin de sécuriser le dispositif, le Gouvernement a choisi par voie réglementaire un mécanisme de compensation qui sera mis en œuvre par les organismes agréés gérant le régime de sécurité sociale des artistes auteurs (Agessa et Maison des Artistes) et qui sera financé sur le budget du ministère de la Culture en 2018. » (C’est nous qui soulignons.)

Cette formulation appelle trois remarques. Premièrement, c’est par un décret (et non par un amendement au PLFSS 2018 voté par l’Assemblée ces jours-ci) que seront définies les modalités de la « solution ». Deuxièmement, le fait que l’Agessa et la Maison des Artistes soient chargées de sa mise en œuvre semble indiquer que seront exclus du dispositif les « assujettis ». Troisièmement, c’est le budget du ministère de la Culture qui financera cette mesure.

Le SELF, au sein de l’USOPAVE (Union des Syndicats et Organisations Professionnelles des Arts visuels et de l’Écrit) défendait une solution applicable à tous les artistes-auteurs, quel que soit leur niveau de revenu, qui aurait facilement pu être mise en œuvre par l’adoption en deuxième lecture à l’Assemblée de l’amendement introduit au Sénat. Force est de constater que le compte n’y est pas. Par ailleurs, comme l’indique fort justement le CAAP (Comité des Artistes Auteurs Plasticiens), faire supporter au budget de la Culture cette compensation peut surprendre alors que celle consentie aux salariés n’a pas été imputée à celui du ministère du Travail… Notons également que la « solution » ainsi trouvée ne concerne que l’année 2018 et n’est pas pérenne.

« Ce dispositif ne sera pas une subvention destinée à s’acquitter de la cotisation vieillesse, poursuit le communiqué du ministère, mais bien une mesure de garantie du pouvoir d’achat. » Ce que peuvent signifier ces précisions, nous en sommes encore à nous le demander et serions ravis qu’on nous éclaire sur le sujet. Concrètement, quelle forme prendra cette mesure ? Mystère. Ce qui semble sûr, c’est qu’elle ne passera pas par une baisse pour tous de la cotisation vieillesse de base que réclamaient les artistes-auteurs et leurs organisations représentatives.

« Dans le courant de l’année 2018, poursuit la ministre, une mission de l’inspection générale des affaires sociales et de l’inspection générale des affaires culturelles permettra de faire des propo­sitions pour une solution pérenne à l’avenir. » Traduction : « Le ministère a paré au plus pressé pour ne remédier que partiellement à une injustice touchant tous les artistes-auteurs, mais ayez confiance, vous pouvez compter sur ceux qui n’avaient rien prévu afin d’éviter cette situation pour trouver une solution à l’avenir. » Qu’on nous permette d’en douter et de réclamer quelques gages supplémentaires…

En conclusion, le SELF prend acte de cette avancée pour une partie des auteurs et autrices qu’il représente mais demande instamment à madame la ministre de préciser ses inten­tions sur ce dossier et de donner des garanties pour que la solution mise en œuvre concer­ne tous les artistes-auteurs, pour l’année 2018 comme pour les années suivantes. En outre, il semble légitime de réclamer que les artistes-auteurs, par le biais de leurs organisations professionnelles, soient associés aux décisions qui seront prises et auront une influence non négligeable sur leur pouvoir d’achat comme sur leur avenir. Les artistes-auteurs doivent rester vigilants et mobilisés sur le sujet. Ils ne peuvent se contenter d’une demi-mesure qui ne règle qu’en partie et provisoirement une injustice qui les touche tous et qui risque de s’installer dans la durée.

 

Petit rappel bien instructif : la parole ministérielle AVANT (communiqué de presse du 15 novembre 2017, qui avait fait naître bien des espoirs) et APRES (communiqué de presse du 29 novembre 2017, qui nous ramène sur terre).

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